Paris dans l’œil des cinéastes américains : romantisme, nostalgie et action

Paris dans le cinéma américain, c’est surtout le romantisme. C’est aussi le paradis perdu des années folles, qui avaient attiré les artistes américains de Scott Fitzgerald à Sidney Bechet, de Man Ray à Ernest Hemingway. Un aperçu sur ces 20 dernières années… Hasard ? La plupart des réalisateurs sont New-Yorkais.

Woody Allen est amoureux des villes, et d’abord de New York, la sienne, maintes fois présente dans ses films dont bien sûr Manhattan. Il tourne en 2011 Midnight in Paris, Oscar du meilleur scénario en 2012 après avoir filmé Londres (Match Point, Cassandra’s Dream), Barcelone (Vicky Cristina Barcelona) et Rome (To Rome with Love). Dans Midnight in Paris, le héros est projeté dans le Paris des années 30. Outre les monuments et rues de Paris, on y visite le luxueux Hôtel Bristol où vivent ses personnages … et où Woody Allen loge pendant le tournage. Ce 5 étoiles apparaissait déjà dans Le temps de l’innocence de Martin Scorsese.

La même année 2011, Martin Scorsese, réalise Hugo, Oscar (entre autres) de la meilleure cinématographie et des meilleurs effets visuels en 2012. Il y reconstitue un Paris merveilleux des années 30. Le jeune héros y rencontre Georges Méliès, inventeur du film de science fiction et des effets spéciaux, âgé et oublié, vendeur de jouets et de bonbons à la gare Montparnasse. Martin Scorsese n’oublie pas non plus sa ville natale, notamment dans Taxi Driver, New York, New York et Gangs of New York tl_files/actu/hugo cabret.jpg

Entre 1995 et 2013 Julie Delpy tourne avec le cinéaste indépendant Richard Linklater la trilogie Before, “romance anti-hollywoodienne”, avec pour partenaire Ethan Hawke, Texan comme le réalisateur. Dans le deuxième épisode, Before Sunset, de 2004, Céline et Jesse se rencontrent de nouveau à Paris après la première et brève rencontre à Vienne de Before Sunrise. Le film est tourné presque en temps réel entre le quartier du Marais, la Seine et la coulée verte.

Il s’achève dans l’appartement de Céline. Sur la chaîne stéréo, Nina Simone chante “Your love came just in time …”

Celine: “Baby, you are gonna miss that plane.”

Jesse: “I know.”

Cette dernière réplique ne trouve sa suite qu’en 2013 avec Before Midnight.

Le romanesque était déjà à l’œuvre en 1995 dans Sabrina, réalisé par Sydney Pollack. Remake d’un film de Billy Wilder, il a moins de charme et de mordant que l’original dont le rôle-titre était tenu par Audrey Hepburn. C’est l’histoire d’une sorte de Cendrillon, dans lequel ce n’est pas une fée qui tient la baguette magique, mais un séjour à Paris qui transforme la fille d’un chauffeur en femme élégante et sophistiquée.

French Kiss de Lawrence Kasdan sort aussi en 1995. Dans l’avion qui l’emmène à Paris, Meg Ryan chante Frank Sinatra à l’envers: “I hate Paris in the springtime / I hate Paris in the fall / I hate Paris in the summer when it sizzles / I hate Paris in the winter when it drizzles / I hate Paris, oh why oh why do I hate Paris? / Because my love is there... with his slut girlfriend.” … Mais elle rencontre Luc (Kelvin Kline).

La même année encore sort Oublier Paris de Billy Crystal, acteur et réalisateur new-yorkais, dans une narration originale. Paris est le lieu de la rencontre romantique, les Etats-Unis celui de la vie qui s’ensuit, la vie du « ever after » (à tous jamais) des contes de fées qui dans la réalité peut côtoyer le drame. Ces trois comédies romantiques, tout en n’oubliant pas la poésie des rues de Paris et des quais de Seine, ne sont ni mièvres ni lisses.

En 2003, James Ivory réalise Le Divorce, entièrement tourné à Paris. À travers l’histoire de deux sœurs (Kate Hudson et Naomi Watts), il met en scène le choc culturel dans les relations entre américains et français. Mais le film présenté comme une comédie romantique manque de légèreté et les différences culturelles sont trop caricaturales.

Cuisine, élégance et action

Si Paris apparait d’abord comme la ville romantique par excellence, deux clichés du glamour de la vie parisienne y contribuent : la mode et la cuisine. On retrouve l’une puis l’autre dans deux comédies portées par Meryl Streep : En 2006, c’est la mode qui est à l’honneur dans Le Diable s’habille en Prada, de David Frankel (un New-Yorkais !) ; en 2009 c’est la cuisine française dans Julie & Julia, de Nora Ephron. Ces deux comédies s’inspirent de la vie de personnes réelles et se partagent entre New York et Paris, preuve que la Grosse Pomme a fait sienne aussi ces deux fleurons de la capitale française.

On retrouve l’élégance parisienne dans le rôle de Vincent Cassel qui joue un riche et élégant baron dans Ocean’s Twelve de Steven Soderbergh en 2004. Mais cet aristocrate se trouve être aussi un voleur qui défie Danny Ocean. La méthode du français pleine de classe naturelle s’oppose à la technologie des casseurs américains. L’action se déroule dans plusieurs pays d’Europe, avec des séquences à Paris et sur la côte méditerranéenne.

Ce film fait suite côté thriller à Ronin, réalisé en 1998 par John Frankenheimer né dans le Queens, et Femme Fatale de Brian de Palma en 2002 qui se déroulent également entre Paris et Côte d’Azur, deux lieux emblématiques pour les américains.

Mais Paris c’est aussi la ville dont les vieilles rues se prêtent aux poursuites et aux guet-apens des films d’action. Doug Liman, cinéaste new-yorkais, réalise en 2002 La mémoire dans la peau (The Bourne Identity). Thriller qu’il tourne à Paris alors que la production aurait préféré le Canada … moins loin, donc moins cher, et on y parle aussi le Français ! Jason Bourne, le héros du film, poursuivi par la police, dévale le passage Plantin dans le 20e arrondissement en Austin Mini.

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Un des morceaux de la musique originale de John Powell s’intitule On bridge Number 9 … erreur de traduction pour Le Pont Neuf où sont tournées deux scènes du film. C’est sur le Pont Neuf que Jason Bourne fait venir un reponsable de la  CIA grâce au téléphone pris sur un agent tué : “Enough. 5:30 p.m. Paris. Today. Pont Neuf. You come alone, you walk to the middle of that bridge. You take off your jacket. Face east. I'll redial this number.” C’est à partir de cette rencontre que le héros va retrouver la mémoire… Mais il lui faudra encore deux films!

Dans le cinéma américain, Paris se trouve donc être souvent le cadre privilégié de rencontres déterminantes, de retrouvailles, de séparations. Plutôt qu’un lieu de vie quotidienne, c’est la ville où tout peut arriver, la ville hors du temps où loin de chez lui le voyageur ou l’exilé américain change de vie.

Tous les films mentionnés ici ont été tournés à Paris en décors réels, alors que Paris apparaît aussi dans bien d’autres films dont le tournage s’est déroulé en studio, voire en extérieur dans d’autres villes. 

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